"La nouvelle revue des élytres" (extraits)

By Dominique Aguessy - novembre 04, 2021




- Bleus d'aurore, éditions du Cygne, 2021, 99 p., 13,00 EUR -

"Dominique Aguessy qui nous revient donc, cet automne, avec un nouveau recueil titré « Bleus d'aurore», ensemble de quatrains consacrés à la re-naissance, aux naissances secondes que chantent les matins azuréens qui se tirent du vécu des nuits qui se sont faites un sang d'encre.

 

 

Ah, palsambleu ! Où donc ancrez-vous la vie ?

 

 

C'est à mer qu'il faut mouiller l'ancre me dit un jour un Perse qui, à l'horizon de sa dédicace m'écrivait encore ceci: «- Nous qui mourrons peut-être un jour disons l’homme immortel au foyer de l’instant. » [2]

 

 

Cet instant[3] des choses aussi fugace et fragile[4] que cette aurore -moment clôturant l'aube juste avant le lever du soleil- qui, en mourant, nous fait le jour nouveau. [5]

 

 

Fragilité et évanescence signent donc ce recueil où les sinuosités de l'existence, ce chemin difficile, "plus difficile que de monter au ciel bleu" , selon le mot de Li Baï que pointe l'auteur en exergue, sont traitées littérairement sous la forme la plus courante -c'est dire : la plus stable- de l'organisation poétique qu'est le quatrain.

 

 

En 1574, Guy du Faur, seigneur de Pibrac publia ses Quatrains moraux, de facture stoïco-chrétienne à l'imitation des poètes gnomiques[6] gréco-latins de l'antiquité (Phocylide de Millet, Théognis de Megare, Épicharme[7] ou encore Hésiode[8] pour les Grecs, Publius Syrus ou Dionysius Cato pour les Latins,[9] en sont les représentants emblématiques).

 

 

Ce quatrain de vers -qui forment versets, versets qui se font litanie-[10] était donc sans nul doute la forme la plus appropriée à cette poésie qui est autant acte de parole, qu'acte de foi ou, en d'autres mots, acte de vie !

 

 

À ceux qui jugeraient cette poésie trop austère, sur le fond ou la forme, Pierre Oster [11] -qui nous a quitté l'an passé- éminent représentant contemporain du genre et auteur, justement, de "Quatrains gnomiques", rappelaient que « rien ne compte, en définitive, pour qu'il y ait vers, que la quantité de sens. » [12]

 

 

Quête de sens, chaque jour renouvelée, "re-nait-sens" ; n'écrit-elle pas: «chaque instant s'invente/calme ou tourmenté/ indispensable à la quête/ de la joie d'exister » ? [13]

 

 

Bien sûr "l'homme de vigie" est de garde et sonne le tocsin "dans sa corne de fer" rouge:

 

 

«Défaite de nos armes/glissent nos larmes/ sur bien des regrets/ réduits à des reflets/ Tant de prétendus soldats/ circulent en renégats/ à disposition de nababs/ retranchés en Katiba » ; [14]

 

«De quels mensonges/sommes-nous prisonniers/de quelle imposture/ nous faisons nous complices» ; [15]

 

 

Mais,


«Vivre avec c'est d'abord vivre

 

côtoyer le fauve ivre

 

dépasser la peur des leurres

 

s'émerveiller de la fragilité des fleurs » [16]

 

Alors,

 

«Une sorte de douceur

 

s'installe près de moi

 

tandis qu'assise sur une pierre

 

je me fonds dans le paysage » [17]

 

 

C'est ainsi, finalement, d'une poésie de la libre sérénité dont témoigne Dominique Aguessy dans ce recueil que je quitte, comme je quittais Aurore, pour prendre ma route, «Mauve des lavandes/ printemps en vue/ à pas pèlerins/renouvelés»…[18]"

 

 

-


On raconte que la divine Aurore à la robe de safran a, chaque matin, son heure de blues, qui transforme son chagrin en une douce rosée. De la rosée versée pour le "noir Memnon", son fils tant aimé qu'a tué Achille, "Memnon l'éthiopien" qui fut "le plus beau des guerriers qui ait paru devant Troie".[1]

 

 

Moi, dont le corps de colosse noir quitte ce matin ta couche, ma blanche Aurore, comme jadis, tu quittas celle de l'antique Tithon qui, reclus en ton palais où vieillissant sans fin, il appelle la mort, comme chante la cigale, qui chante sans espoir et à qui tout est égal, je connais ce sentiment….tu le connais aussi lecteur, «-Hypocrite lecteur,- mon semblable,- mon frère ! », ces heures bleues comme la note désespérée évadée d'un nocturne de Chopin.

 

 

Et pourtant, il fait grand matin, aujourd'hui !...C'est ce que tu en retiendras, mon petit, c'est ce que "tu leur diras", me dirait peut-être Dominique Aguessy…

 

 

Dominique Aguessy qui nous revient donc, cet automne, avec un nouveau recueil titré « Bleus d'aurore», ensemble de quatrains consacrés à la re-naissance, aux naissances secondes que chantent les matins azuréens qui se tirent du vécu des nuits qui se sont faites un sang d'encre.

 

 

Ah, palsambleu ! Où donc ancrez-vous la vie ?

 

 

C'est à mer qu'il faut mouiller l'ancre me dit un jour un Perse qui, à l'horizon de sa dédicace m'écrivait encore ceci: «- Nous qui mourrons peut-être un jour disons l’homme immortel au foyer de l’instant. » [2]

 

 

Cet instant[3] des choses aussi fugace et fragile[4] que cette aurore -moment clôturant l'aube juste avant le lever du soleil- qui, en mourant, nous fait le jour nouveau. [5]

 

 

Fragilité et évanescence signent donc ce recueil où les sinuosités de l'existence, ce chemin difficile, "plus difficile que de monter au ciel bleu" , selon le mot de Li Baï que pointe l'auteur en exergue, sont traitées littérairement sous la forme la plus courante -c'est dire : la plus stable- de l'organisation poétique qu'est le quatrain.

 

 

En 1574, Guy du Faur, seigneur de Pibrac publia ses Quatrains moraux, de facture stoïco-chrétienne à l'imitation des poètes gnomiques[6] gréco-latins de l'antiquité (Phocylide de Millet, Théognis de Megare, Épicharme[7] ou encore Hésiode[8] pour les Grecs, Publius Syrus ou Dionysius Cato pour les Latins,[9] en sont les représentants emblématiques).

 

 

Ce quatrain de vers -qui forment versets, versets qui se font litanie-[10] était donc sans nul doute la forme la plus appropriée à cette poésie qui est autant acte de parole, qu'acte de foi ou, en d'autres mots, acte de vie !

 

 

À ceux qui jugeraient cette poésie trop austère, sur le fond ou la forme, Pierre Oster [11] -qui nous a quitté l'an passé- éminent représentant contemporain du genre et auteur, justement, de "Quatrains gnomiques", rappelaient que « rien ne compte, en définitive, pour qu'il y ait vers, que la quantité de sens. » [12]

 

 

Quête de sens, chaque jour renouvelée, "re-nait-sens" ; n'écrit-elle pas: «chaque instant s'invente/calme ou tourmenté/ indispensable à la quête/ de la joie d'exister » ? [13]

 

 

Bien sûr "l'homme de vigie" est de garde et sonne le tocsin "dans sa corne de fer" rouge:

 

 

«Défaite de nos armes/glissent nos larmes/ sur bien des regrets/ réduits à des reflets/ Tant de prétendus soldats/ circulent en renégats/ à disposition de nababs/ retranchés en Katiba » ; [14]

 

«De quels mensonges/sommes-nous prisonniers/de quelle imposture/ nous faisons nous complices» ; [15]

 

 

Mais,

 

«Vivre avec c'est d'abord vivre

 

côtoyer le fauve ivre

 

dépasser la peur des leurres

 

s'émerveiller de la fragilité des fleurs » [16]

 

Alors,

 

«Une sorte de douceur

 

s'installe près de moi

 

tandis qu'assise sur une pierre

 

je me fonds dans le paysage » [17]

 

 

C'est ainsi, finalement, d'une poésie de la libre sérénité dont témoigne Dominique Aguessy dans ce recueil que je quitte, comme je quittais Aurore, pour prendre ma route, «Mauve des lavandes/ printemps en vue/ à pas pèlerins/renouvelés»…[18]

 



Source: NRE 41 - Novembre 2021 - LOT 1 (grenierjanetony.be) (milieu de page)

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